Les rencontres de l’UDECAM : « Ensemble, responsables pour la société », les temps forts de la deuxième journée

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La deuxième journée des rencontres de l’Udecam, qui s’est tenue dans les locaux du groupe Les Echos- le Parisien, était consacrée à la thématique « Ensemble responsables pour notre société ».  Les médias, les marques, les agences et même les citoyens consommateurs ont leur rôle à jouer dans la transformation de notre société. Chacun, dans sa responsabilisation, peut développer des pratiques durables. Voici les grands temps de ce deuxième rendez-vous.

La responsabilité des médias, des marques et des agences

Si la responsabilité des groupes médias envers la société repose dans leur contenu, il en va également de ces derniers d’initier le changement au sein même de leur entreprise. « Les médias doivent raconter le monde mais le groupe lui-même doit se poser en tant qu’entreprise pleinement responsable qui se fait l’expression d’un groupe qui change », explique Pierre Louette, Président et directeur général du groupe Les Echos« Nous nous sommes engagés dans cette démarche, nous avons fait un bilan carbone de notre entreprise média. Nous consommons toute une série d’énergies comme le papier. Nous avons par exemple trouvé dans les Vosges un producteur de papier qui recycle, replante et possède un label de haute qualité. Nous sollicitons aussi l’impression avec de l’ancre végétale et au niveau de l’informatique, nous travaillons avec des outils qui permettent d’avoir moins de mails inutiles stockés. »

Les contenus du groupe les Echos- Le Parisien se veulent aussi de plus en plus verts et traitent de sujets comme l’engagement responsable, la permaculture, etc. « L’idée c’est que tout ce qu’on dit est l’expression d’un groupe qui change. » Qu’en est-il du changement sur le plan éditorial ? Les lecteurs sont demandeurs. « Plus on en fait, plus la demande est là. Il y a un vrai appétit et une vraie prise de conscience des consommateurs de tous les âges. Chez Les Echos, on veut informer, sensibiliser et mobiliser. »

Emilie Thiry, CEO de The Good, plateforme de la good économie, constate que le changement, la responsabilisation s’est opérée il y a un peu plus de 10 ans. Les consommateurs ont commencé à questionner les marques et les entreprises qui se sont remises en question et ont réfléchi à leur utilité. Les marques corporate ont alors pris peu à peu le pas sur les marques produits. Après 2015, la tendance s’est accélérée, les entreprises, les DNVB (Digital Native Brand) tout comme leurs jeunes employés – les Millenials- se veulent davantage responsables et sont muées par une vocation durable. « Il y a eu, à partir de 2019, un alignement des planètes. On a d’une part les consommateurs, moteurs de leur transition écologique et demandeurs d’un accompagnement et, d’autre part, les marques, les entreprises, qui ont répondu à ces attentes tous comme les politiques. » Et la crise sanitaire n’a fait qu’accentuer cela. Les marques qui sont sorties gagnantes de cette situation inédite sont celles qui se sont engagées durablement.

Selon Pierre Calmard, Président de Dentsu Aegis Network, le changement et la transition vers une responsabilisation écologique dépendent du consommateur et de l’agence média, du dynamisme qui existe entre les deux. Les spécialistes média sont les ‘facilitateurs’ de ce changement. « Le métier historique de l’agence média, c’est la compréhension du consommateur. C’est utiliser tous les insights possibles, les infuser et développer une stratégie pour les marques et ainsi déployer du business. »

Par ailleurs, selon le directeur, il est primordial d’avoir une communication qui est en corrélation avec l’authenticité des messages. Par exemple, de nos jours, une publicité sur des sodas très sucrés, n’est plus du tout pertinente. Le citoyen veut vivre dans un environnement responsable. « Le rôle de l’agence média et toutes les agences en général, c’est de faire comprendre à tous nos clients marques, même s’ils en sont déjà conscients, la façon dont ils vont pouvoir adapter leur publicité à ce nouveau paradigme responsable. Nous avons un rôle social essentiel. »

Patrick Mercier, CEO de Change, quant à lui, revient sur la notion de « bénévolance », la bienveillance au service des entreprises. Ce concept s’impose comme un outil très utile et responsable pour pouvoir engager la transformation des entreprises. Cependant, un blocage demeure encore : certes les changements sont déjà notoires mais si on veut les accélérer, il faut procéder à une relecture de la performance des entreprises. « Cette relecture doit venir des banques, des investissements et de l’état. Il faut, lors du bilan de l’entreprise, pas seulement regarder les résultats mais constater qu’il y a aussi des actions responsables et qualitatives. Et c’est comme cela que l’on pourra avancer très rapidement. »

La responsabilité des plateformes

Selon Markus Reinisch, VP Public Policy Europe, Middle East and Africa chez Facebook, le réseau social est un endroit très sécurisé pour annoncer. Tout est mis en place pour contrer les discours haineux et les fake news. Il en va de la responsabilité des plateformes.

« Nous avons des ‘communities standards’ très sophistiqués qui décident quels types de contenus peuvent rester sur la plateforme. Ces standards sont soutenus par toute une série de ressources dont notamment l’intelligence artificielle. » Mais pour éviter que tout contenu indésirable ne filtre, il faut également une ‘human review’. Une façon de conserver l’intégrité de la plateforme. « Ce sont 35.000 employés, internationaux, qui sont chargés de modérer les discours haineux. » La responsabilité est donc corrélée à la technologie mais aussi à l’individu. « C’est quelque chose de très technique mais qui dépend aussi de l’humain » et de son efficacité.

Les intervenants débattent autour de la question de la responsabilité des agences, des médias et des marques

Le manifeste écologique

C’est à l’aune d’une prise de conscience écologique aiguë et un monde du travail qui n’évolue pas dans la bonne direction que le manifeste « Pour un réveil écologique » est né. Emmanuelle Huet, autrice de l’ouvrage et étudiante à l’Essec, lance un cri du cœur et appelle au changement. « Pourquoi me rendre au bureau à vélo si mon travail contribue à la création de centrales à charbon ? On ne croit plus à la surconsommation, à une société qui nous promet tous les jours la démultiplication des possibles alors qu’il faut se tourner vers un avenir et une société plus sobre. » Pour la jeune étudiante, cette sobriété numérique est encore mal interprétée par les entreprises. Concrètement, il s’agit de réduire les usages, de ne pas pousser à la surconsommation ni de soutenir des activités polluantes.

Marie-Laure Monet, Directrice du planning stratégique chez Zenith (Publicis) nuance ce propos. Elle estime que la difficulté de la sobriété numérique est qu’elle ne passera pas par la contrainte. « Internet c’est utile, la crise l’a encore plus montré. Il faut savoir préserver l’utile et optimiser son impact. La publicité est un outil pour changer la mentalité et normaliser les messages. » Celle-ci sert de transition vers la responsabilisation.

En termes de responsabilisation, la directrice recommande de travailler sur le média et sur la diffusion. « Aujourd’hui nous avons différents outils pour mesurer notre empreinte carbone mais ils sont tous un peu dissonants. L’idéal c’est de se tourner vers des experts. L’idée c’est, sur un temps court, d’avoir des actions concrètes sur la pollution digitale et tester des solutions sur le marché. »

Faut-il interdire la publicité ?

C’est autour du projet de loi visant à l’interdiction progressive de la publicité que Matthieu Orphelin, député à l’origine de cette proposition législative, Pierre Calmard et Olivier Altmann, CEO et COO de Altmann + Pacreau, ont vivement débattu.

La parole à la défense. Pierre Calmard reconnait que la publicité et les médias impactent le climat mais il insiste également sur leurs bienfaits. En effet, la publicité, « est un instrument extraordinaire de transition écologique ». Selon lui, l’interdiction ne peut pas s’opérer sur tous les supports publicitaires. « L’affichage digital entre autres s’est avéré utile voire serviciel, pourquoi aller l’interdire ? Avec la crise sanitaire, les médias vont perdre 2 milliards de revenus. Ce genre de loi – qui devrait être appliquée d’ici 2022- nous plongerait encore plus. »

Olivier Altmann, quant à lui, dénonce la méthode de cette loi qu’il estime désuète. « Les Français ont besoin de positif et d’être encouragés et non d’être dans une écologie punitive. Nous allons augmenter les tensions si nous faisons de l’écologie d’une sanction. Nous avons ce mal français de vouloir tout réguler. » Dans cette optique, la vision de la communication n’est pas la bonne. Il ne faut pas opter pour un ton réprobateur. « Si on veut inciter les gens à être responsables il faut leur raconter un discours positif. »

Se méfier des discours écologistes

Laurent Alexandre, entrepreneur, médecin et spécialiste du monde des médias, a une conception bien particulière de l’écologie. Il dénonce une manipulation massive des opinions de la part des écologistes qu’il compare à des communistes. « Les écologistes remettent en cause l’économie de marché. Ils n’ont fait que reverdir les discours soviétiques. Ils proposent un monde gris, sans consommation populaire voire même inhumain. »

L’humaniste invite par ailleurs à ne pas se laisser instrumentaliser. « On veut supprimer la publicité et tout ce qui fait nos petites joies en augmenter le CO2. C’est une stratégie scandaleuse. On va fermer les centrales nucléaires mais on va énormément polluer en les fermant. »

En ce qui concerne le monde des médias, il affirme que : « ce n’est pas à la pub de se censurer. L’étape d’après sera d’interdire les films et les livres qui ne sont pas écologiques. La publicité ne doit pas s’engager dans une logique décroissante. Il faut que nous consommions des produits qui émettent moins de CO2. Et c’est une taxe carbone qui doit le faire et non la publicité. C’est la fiscalité sur le carbone qui doit conduire les gens à avoir un comportement vertueux. »