Vivendi lance son offre sur Lagardère

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Vincent Bolloré, aux manettes du groupe français Vivendi, lancera jeudi l’offre publique d’achat pour prendre le contrôle de Lagardère, ultime étape d’un assaut de deux ans sur le leader de l’édition française, Hachette Livre, et des médias influents. Vivendi était entré au printemps 2020 au capital du propriétaire d’Europe 1, du Journal du Dimanche et de Paris Match, alors affaibli par la crise du Covid-19 (notamment sur son réseau de boutiques dans les gares et aéroports) et menacé par une fronde actionnariale. Le poids lourd des médias, propriétaire de Canal+ mais aussi d’Editis et d’Havas, avait su s’allier au fonds activiste Amber Capital pour obtenir une transformation de la citadelle imprenable Lagardère en société anonyme ordinaire et surtout « opéable ».

Après avoir mené bataille, Arnaud Lagardère, à la tête d’un empire industriel et médiatique construit par son père Jean-Luc disparu en 2003, a dû se résoudre à accueillir « le groupe Vivendi et la famille Bolloré, gage de stabilité et de soutien à notre culture, notre stratégie et notre intégrité sur le long terme », a-t-il écrit récemment à ses actionnaires. Ces derniers pourront, du 14 avril au 20 mai, céder leurs parts à Vivendi à 25,5 euros par action (comprenant le dividende de 50 centimes proposé par Lagardère au titre de l’exercice 2021), selon le projet d’offre qui a été validé mardi par l’Autorité des marchés financiers (AMF), qui l’a déclaré « conforme ».

Aujourd’hui propriétaire de 45% des titres Lagardère, le groupe de Vincent Bolloré, qui dispose d’une large trésorerie après la cession d’Universal, souhaite à ce prix devenir majoritaire. Mais il a également imaginé un mécanisme d’offre subsidiaire, qui lui permet d’acquérir toute action restante au prix de 24,1 euros jusqu’au 15 décembre 2023. « On ne sait pas encore si Bernard Arnault (qui détient 10% via la Financière Agache) et le Qatar (11,5% via Qatar Investment Authority) vont apporter leurs titres », a expliqué un analyste interrogé par l’AFP.

Moyen de financement

Confronté à un lourd endettement personnel, Arnaud Lagardère, qui a obtenu de rester PDG jusqu’en 2027, a en revanche déjà fait part de son intention d’apporter ses 15,6 millions de titres (soit 11% du capital) à l’offre subsidiaire et de nantir immédiatement les droits de cession obtenus en garantie d’un nouveau financement. Le dirigeant ouvre ainsi la voie à une cession de ses titres, sans attendre la réalisation de l’opération qui reste suspendue au feu vert des autorités européennes de la concurrence.

Le rapprochement entre Hachette et Editis, les deux leaders de l’édition en France, aboutirait en effet à une position ultra dominante de cette nouvelle entité sur le secteur, que Vincent Bolloré lui-même avait reconnu devant des sénateurs en déclarant que le mariage « n’arriverait pas sans que des mesures soient prises en France », notamment des cessions de maisons d’édition.

Médias

Sur le plan des médias, la radio Europe 1 est déjà bien arrimée à la chaîne d’info conservatrice CNews, avec qui elle partage nombre d’animateurs. L’intégration officielle de la station devra toutefois obtenir l’agrément de l’Arcom (ex-CSA). Quant au magazine Paris Match et à l’hebdomadaire le Journal du Dimanche, ils semblent destinés à être intégrés par Vivendi dans le groupe de presse Prisma Media, et ont vu ces derniers mois plusieurs dirigeants être limogés ou se retirer.

L’empressement de Vivendi à intégrer Lagardère peut s’expliquer par la volonté de Vincent Bolloré, qui a fêté ses 70 ans le 1er avril, de céder le pouvoir à ses enfants. Une transition pour laquelle des points restent à régler mais dont les contours semblent se dessiner : la banque Oddo BHF s’attend ainsi à ce que le prochain projet du groupe Bolloré, qui a les poches pleines après avoir aussi vendu pour près de 6 milliards d’euros ses activités de logistique africaines, soit de devenir majoritaire chez Vivendi, dont il détient aujourd’hui 29,5%. Ce faisant, Vincent Bolloré sécuriserait fortement son nouvel empire médiatique, avant de le transmettre.

Source : AFP.